RollingBone interview DJ Buddha et Scotty « Booh » Man
Souriceau Investigateur, Magazine RollingBone, septembre 16
Nous savons tous que les équipes aux joueurs radicalement différents sont plus créatives que les équipes homogènes. Mais comment faire pour obtenir de la cohésion de ces joueurs radicalement différents ? À mon expérience, ces équipes ont de la difficulté à s’organiser durant les premiers matchs car l’inclusion des joueurs est une chose mais leur intégration en est entièrement une autre. J’ai réalisé que des joueurs très différents ont énormément besoin d’aide de leur coach pour arriver à former une équipe.
Prenez les Démons ou les Clubbers, par exemple. L’un inclus des goules et des zombies aux styles de jeu fort différents. L’autre amalgame des rats et des gobelins, deux ethnies naturellement opposées. Ce genre de joueurs est ordinairement très hésitant à faire connaissance et en viennent souvent à volontairement ou involontairement s’insulter. Les coachs, dans la jeune vie d’une équipe, utilisent beaucoup de leur temps à faire la promotion de la cohésion en établissant des valeurs clés: le respect, l’intégrité, le sacrifice et le sens du devoir.
C’est seulement lorsqu’ils ont intégré ces valeurs que les joueurs peuvent apprécier les avantages de la diversité quand vient le temps d’enfoncer une muraille défensive orque. Pour les coachs, obtenir ce succès demande une certaine forme d’étude. J’ai discuté des éléments cruciaux de leurs approches respectives avec DJ. Buddha des Clubbers et Scotty « Booh » Man des Démons. Voici une brève incursion.
Souriceau: Pourquoi avez-vous voulu ce job de coach ?
DJ Buddha: C’est probablement de la faute à l’un de mes traits de personnalité : je suis toujours à la recherche de l’excellence – que certains vont appeler du perfectionnisme. La vérité est que si on élève la barre pour notre équipe, notre équipe va, en retour, nous l’élever aussi. Je crois qu’il y a aussi le plaisir de développer une équipe parce qu’à mesure que l’on travaille à augmenter les possibilités de nos joueurs, nos propres possibilités sont proportionnellement multipliées par 10. C’est pas mal ce genre de cercle vicieux qui m’a aspiré à la tête des Clubbers.
Scotty « Booh » Man: À mes débuts, je n’étais qu’un fan de football américain à qui on a montré à l’école à calculer des choses compliquées et parfois ennuyantes qu’on appelle probabilité. Quand on combine ces 2 choses, on obtient ce jeu passionnant qu’est le blood bowl. Au début, je jouais pour le plaisir sur l’ordinateur, mais les coachs abandonnaient souvent et ne me parlaient que pour me thrash talk. Ce que cette ligue offre et que j’adore, c’est le contact humain. Chaque match est joué jusqu’au bout avec une ambiance d’amicale compétition introuvable en jouant sur PC.
Souriceau: Quelles ont été vos erreurs, cette saison et quelle est votre plus grande faiblesse ?
Scotty « Booh » Man: Principalement 2 choses! D’abord, je me suis fais dominer aux sorties quelques fois dû à un positionnement trop agressif et à une valeur d’équipe très inférieure à mes adversaires en début de saison. Deuxièmement, j’ai été nonchalant par mon positionnement et j’ai sous estimé mes adversaires en fin de match. Je pense particulièrement à mon match face aux Plaies qui m’ont égalisé en 2 tours et aux Meanmachines qui m’ont marqué 2 fois en un tour dans le même match! Ma plus grande faiblesse est que je craint parfois d’être trop méchant!
DJ Buddha: En début de saison, je crois que ma principale erreur était de dépendre beaucoup trop du rendement des « vedettes » de mon équipe. Une seconde erreur a été de limoger Gordon, le gobelin boiteux – et je crois que cette mise à pieds anodine affecte encore l’équipe car les gobelins expérimentés ne courent vraiment pas les rues ! Après avoir réalisé cette erreur, on a enduré pendant très longtemps le gobelin Greco qui boitait davantage et il nous a malgré tout rendu d’excellents services. Il m’a fallu plusieurs matchs pour me rendre compte de l’importance des gobelins à la cohésion de l’équipe. À vrai dire, ma plus grande faiblesse est que je peine encore à coacher les Clubbers comme une équipe.
Souriceau: Et qu’avez-vous appris de ces erreurs ?
DJ Buddha: Tout le monde peut coacher avec succès une équipe de vedettes ou de joueurs aux statistiques exceptionnelles. Personne n’est jamais surpris de voir des elfes ou des stats freaks dans le top 4. À la tête des Clubbers, j’ai appris que je devais encore davantage contrôler mes instincts pour mieux rester dans les limites du concept d’équipe parce qu’ici, les talents naturels et les stats freaks, on n’en a pas un seul ! Pour une équipe comme les bas-fonds, la différence entre gagner et perdre est dans le 25% inférieur de l’équipe. La plupart des coachs ne vont que travailler avec le 75% supérieur de leur équipe. Mais chez les Clubbers, c’est dans le 25% inférieur que se trouvent les détails qui font la différence finale.
Scotty « Booh » Man: J’ai appris que les coachs de la Kasse Gueule n’abandonne jamais et aussi qu’un blitz peut être très utile pour libérer des joueurs au sol ou sournoisement blessé un skink ou un gobelin.
Souriceau: Pourquoi avez-vous besoin d’affronter des adversaires pour apprendre de vos erreurs ?
Scotty « Booh » Man: Avant tout, il faut être réceptif quand on reçoit des commentaires. Ce n’est pas toujours plaisant, mais il faut que quelqu’un profite de nos faiblesses pour qu’on veuille les corriger et les éliminer. La ligue contient d’excellents coachs qui aiment donner de subtils mais judicieux conseils. Certains voient en moi un grand potentiel et j’espère le développer.
DJ Buddha: Il faut affronter des adversaires pour cumuler les expériences de jeu qui nous permettront de peaufiner nos approches en fonction des différents types d’équipes. Ce qui est une approche positive contre une équipe peut devenir négatif contre une autre. Pour trouver les meilleures approches, il faut observer son équipe en action contre une multitude d’adversaires. Bref, il faut cumuler les expériences de jeu pour carrément « se voir » progresser.
Souriceau: Vous avez déjà affronté votre adversaire de finale, cette saison. Quelle sont ses forces ?
DJ Buddha: Ce qu’on peut saisir en observant a énormément de valeur. Voir un changement dans les habitudes d’un coach ou, par exemple, un soudain changement d’humeur permet, parfois, de tirer un profit inespéré d’une situation de jeu. La capacité d’observer est sous estimée à blood bowl. L’habileté de voir est cruciale, mais parfois, la capacité de voir ce à quoi on ne s’attendait pas l’est encore plus ! Où est-ce que je m’en vais avec ça ? Scotty « Booh » Man est l’exception plutôt que la règle et il ne flanche pas aisément sous la pression. Certains coachs vont s’effondrer dès que quelque chose ne tourne pas rond. Ce genre de réaction n’est pas à attendre des Démons qui vont tenir la ligne et se battre jusqu’au dernier joueur sur le jeu.
Scotty « Booh » Man: 2 choses principalement! Leur première force est leur mobilité. La moitié de l’équipe esquive en 35/36 peu importe les zones de tacle, donc il est très difficile de prendre la défensive à contre pied et d’assurer la protection du porteur. Leur deuxième force est leur coach qui a de loin la meilleure fiche en carrière de la Kasse Gueule. Il maîtrise bien le côté psychologique de la partie. Depuis le début de l’année, il utilise les médias afin de placer les attentes au plus bas pour son équipe, mais au fond de lui même il se croit le meilleur et le favori!
Souriceau: Vous me semblez très cérébral pour un coach qui évolue dans le monde macho du blood bowl !
Scotty « Booh » Man: Ahh! Lancer les dés demande beaucoup plus d’énergie qu’on le croit! Notre contrôle sur le jeu a ses limites. Je suis le maître de mes joueurs, mais je suis l’esclave de mes dés!
DJ Buddha: Hein ! Je semble cérébral ? Si vous pensez trop, vous allez échouer car le jeu se passe très rapidement. Je crois que la clé est plutôt dans la préparation avant le match et aussi dans la répétition de situations de jeu afin que les solutions viennent instinctivement. Un match de blood bowl me fait beaucoup penser à une série d’improvisations sur des thèmes plus ou moins familiers. Aussi, quand je coach, je cherche à conjuguer deux choses en même temps: les limites de chacun de mes joueurs et ma créativité. Travailler à cet équilibre est un exercice beaucoup plus instinctif que cérébral.
Souriceau: Quelle sera votre approche pour ce match crucial et où allez-vous principalement investir vos énergies ?
DJ Buddha: Je vais demander à mes joueurs d’être préparés autant mentalement que physiquement. Quand on coach une équipe du chaos, vous n’avez pas besoin de dire « Ne soyez pas chicken »… parce qu’ils ne sont jamais chicken. C’est comme une meute de grizzlys enchaînés. Par contre, les Clubbers, c’est l’équipe la plus timide du circuit et ils ont besoin de voir leur confiance graduellement renforcée. En match de finale, je vais chercher à leur éviter les pensées qui paralysent ou qui font échouer des esquives. Ça sera, par exemple : « Hey, ton poil est bien brossé aujourd’hui ! » et puis, « Oh, avant que j’oublie, c’est à ton tour d’aller sur la ligne de mêlée. » Vous voyez, on doit avoir une approche totalement différente.
Scotty « Booh » Man: En championnat, il faut garder ça simple. Aucun superbowl ne s’est gagné sur un jeu truqué. Nous allons investir nos énergies dans la victoire et nous nous pratiquerons à résister à une boule de feu, car avec tant de blessé les Clubbers auront des primes de match juteuse. Si nous connaissons un début de match aussi violent que face aux Plaies, il ne restera que 2 ou 3 Clubbers en vie à la mi-temps!
Souriceau: Et pour finir, ressentez-vous de la pression ?
Scotty « Booh » Man: Nos objectifs de présaison étaient clairs! Faire les séries, à partir de là: Énéfel nous guidera. Ce fut le cas en demi-finale. Je pense à la foule qui a relancé le ballon devant Goule Humm, le rocher qui a frappé M-A Lachance et la boule de feu à efficacité quasi optimale 3/3 joueurs au sol et armure du porteur brisé. Mes joueurs étaient nerveux (trois double crâne lancés), mais se sont des gagnants. La pression n’est pas de mon côté. J’irais même jusqu’à dire que notre adversaire à peur de nous. Ceci n’est que suppositions, mais il nous a fortement encouragé à affronter les Faucheurs lors de la dernière semaine, ce qui en cas de nul ou de défaite, nous sortais des séries.
DJ Buddha: Je m’attend à ce que ce match se joue sur l’armure des joueurs; ce qui est ma manière de dire que ça ne sera vraiment pas facile ! Il faut être honnête avec soi-même. La vérité est parfois pénible mais si vous voulez obtenir le meilleur de vous même, vous devez vous appliquer de la pression car c’est la seule chose à laquelle tout le monde sans exception réagit. On est tous meilleur que ce qu’on croit !